• 02/12/2022
  • Par binternet
  • 294 Vues

Uniqlo Le Japonais qui voulait rhabiller la planète<

Il venait d'avoir 25 ans. Et les accrochages avec son père étaient incessants, derrière la caisse de leur magasin de costumes pour hommes Ogori Shoji, installé dans la petite ville d'Ube, tout au sud du Japon. «Nous avions des conceptions totalement différentes», se souvient aujourd'hui Tadashi Yanai. «Il voulait se contenter de faire tourner en toute sécurité nos échoppes. Moi, je rêvais d'en ouvrir plein, d'essayer de nouvelles choses.» Ce soir-là, après un énième désaccord, son père lui tend solennellement le sceau officiel de l'entreprise. «Il m'a dit que je pouvais tenter ce que je voulais et qu'il serait là même si ça tournait mal», confie, dans un sourire lumineux, le patron aujourd'hui âgé de 67 ans.

Depuis, il a fait émerger sur la scène mondiale Fast Retailing, le quatrième plus grand groupe de mode de la planète, propriétaire des marques Uniqlo, GU, Comptoir des Cotonniers, Princesse Tam-Tam ou encore Helmut Lang. Présent dans 17 pays avec quelque 3000 magasins, il affiche, sur l'exercice fiscal achevé en août 2015, pour plus de 1680 milliards de yens de ventes, soit 12,5 milliards d'euros, et 815 millions d'euros de bénéfice net. Des performances qui permettent à l'empire de rivaliser avec l'américain Gap et de se rapprocher des deux leaders mondiaux du secteur, l'espagnol Inditex (Zara, Massimo Dutti...) et le suédois Hennes & Mauritz (H & M). Pour la première fois, depuis l'an dernier, la marque Uniqlo compte même plus de magasins à l'international qu'au Japon (890 contre 844).

Selon le classement Forbes, Tadashi Yanai, qui contrôle l'entreprise avec sa famille, est désormais l'homme le plus riche de l'Archipel, avec un patrimoine de près de 17 milliards de dollars. Pourtant, lorsqu'il déjeune avec ses invités au restaurant français Azure 45 du Ritz-Carlton de Tokyo, situé dans la même tour que le siège de Fast Retailing, il ne s'offre pas de vin. Il se fait rare dans les mondanités. «Son chauffeur ne travaille même pas tous les jours», nous souffle-t-on. Ce lundi de la fin mars, férié dans le pays, il est habillé, comme souvent, en Uniqlo. «C'est un petit cardigan - couleur marine - de la nouvelle collection Lemaire», précise-t-il à ses visiteurs, tout juste arrivés dans son bureau, plutôt simple. Meubles fonctionnels de bois clair. A son poignet, une montre Swatch. Sur les murs, plusieurs grandes photos en noir et blanc de New York par Andreas Feininger. Un polo blanc dédicacé par le golfeur australien Adam Scott, l'un des ambassadeurs vedettes de la marque Uniqlo - un partenariat signé une semaine avant sa victoire surprise aux Masters de 2013. Seules deux images discrètes laissent deviner sa fortune: les clichés de deux terrains de golf en bord de mer. Les siens. Il a acheté, à la fin des années 2000, pour 74 millions de dollars, le Plantation Course et le Bay Course sur l'île de Maui, dans l'archipel de Hawaii, où il s'autorise quelques courtes excursions dans l'année. Il adore le golf, au point d'avoir un petit practice dans le jardin de son immense propriété de Shibuya. «Je collectionne aussi la peinture, mais je n'ai jamais été intéressé par une vie dans le luxe», confie le PDG. Il cherche d'autres frissons. A l'origine, il ne pensait pas les éprouver dans la confection.

Un jeune homme qui rêvait d'ailleurs

Après avoir grandi dans l'appartement juste au-dessus de la boutique de son père, Tadashi Yanai n'a, à 18 ans, aucune envie de reprendre le magasin familial. Il rêve d'une autre vie. Aux Etats-Unis peut-être. «J'ai été élevé dans un Japon occupé par les Américains», se souvient-il. Le soir, il se passionne pour les dessins animés Disney ou la série «Rawhide» qui narre les aventures de cow-boys, avec Clint Eastwood: «Tout le divertissement venait d'Hollywood et nous servait des images merveilleuses des Etats-Unis.» Dès qu'il peut, il quitte sa ville. Tokyo, d'abord. A l'université de Waseda, pour étudier les sciences politiques et l'économie. «Mais je n'étais pas très sérieux. Je jouais au mah-jong ou dans les pachinkos» - des salles de jeux équipées de sortes de machines à sous japonaises. Puis, le «mai 1968» japonais le libère. Son université doit temporairement fermer et il part seul pour un tour du monde initiatique de cent jours. L'Amérique, l'Europe de l'Ouest puis la Turquie, l'Egypte, l'Inde et enfin Hong Kong. Et de grosses déceptions. «Aux Etats-Unis, les gens étaient très abattus. C'était la guerre du Vietnam. On avait l'impression d'étouffer. Les quartiers des auberges de jeunesse où je dormais à New York n'étaient pas sûrs.» Il se sent plus à l'aise sur les routes d'Europe et d'Asie, qui le ramènent vers sa fac, où il obtient finalement son diplôme en 1971. Il est temps de travailler.

Un contact de son père lui trouve un poste chez Jusco, une chaîne de supermarchés. Il ne tient que neuf mois au département de gestion des stocks des ustensiles de cuisine, mais il y découvre quand même l'organisation minutieuse des géants de la distribution. Des codes qu'il voudra plus tard imposer à son père dans sa boutique, où, en bon fils, il finit par revenir. Un peu par dépit. «J'étais assez odieux, je crois, à l'époque. Six des employés ont même démissionné», admet le patron, réputé pour sa rigueur et son goût du micromanagement qui le pousse encore à passer parfois, le week-end, à son retour du golf, dans des magasins de banlieue. «J'ai toujours eu ces grandes idées...» Au cours de ses voyages, il a aperçu des modèles économiques spectaculaires. Et il a commencé à prendre goût à la lecture des livres décodant les réussites de Matsushita Electric Industrial, devenu depuis Panasonic, et de Honda Motor. Tadashi Yanai garde aujourd'hui sur son bureau un modèle réduit du HondaJet, le premier avion du groupe, dont la commercialisation a débuté l'an dernier, soixante-six ans après le lancement de la première mobylette du constructeur, la Dream. «Quelle vision sur le long terme!», s'extasie le créateur d'Uniqlo. Il se lève encore pour aller saisir dans une armoire l'une de ses autres bibles économiques. Un exemplaire fatigué de Made in America, l'autobiographie dédicacée de Sam Walton, le fondateur de Walmart. «Parti de nulle part, il est devenu le numéro un aux Etats-Unis.»

La révolution de la polaire

Convaincu de pouvoir à son tour donner naissance à un géant du Japon, Tadashi Yanai enchaîne d'abord les ouvertures de magasins de costumes, puis décide d'offrir dans ses boutiques toutes sortes de vêtements bon marché de différentes marques. C'est en juin 1984 qu'il inaugure à Hiroshima un premier magasin à l'enseigne Unique Clothing Warehouse, dont l'abréviation donnera «Uniqlo». La franchise aurait dû s'appeler «Uniclo», mais une erreur de transcription sur un document officiel en décidera autrement. Les boutiques fleurissent au bord des routes de province, alors que le groupe, dont la maison mère a pris le nom de «Fast Retailing», entame sa mue. S'inspirant des modèles de Gap ou de Next, qu'il a admirés en Occident, Tadashi Yanai enclenche, en 1997, une intégration verticale complète selon le concept baptisé «SPA» (Specialty Store Retailer of Private Label Apparel). La conception des collections exclusives de la marque revient aux designers, leur fabrication à des sous-traitants en Chine. «Aujourd'hui, nous ne possédons toujours pas d'usine et nous travaillons avec une poignée de partenaires chinois», explique Yoshihiro Kunii, le responsable de la production chez Fast Retailing. «Nous privilégions cette relation de fidélité et, lorsque nous produisons en Indonésie ou au Vietnam, c'est toujours dans des ateliers contrôlés par ces fournisseurs chinois», détaille le cadre.

Uniqlo Le Japonais qui voulait rhabiller la planète

Se sentant enfin prêt, Tadashi Yanai entame en 1998 sa conquête de Tokyo dans le quartier branché d'Harajuku, célébré - entre autres - par la chanteuse Gwen Stefani. Des campagnes de pub sont lancées à la télévision. Et un produit est mis en scène pour séduire tous les publics. «Ce sont nos vestes polaires qui ont alimenté le premier boom», raconte Aldo Liguori, le directeur de la communication de Fast Retailing. Avec une nouvelle fibre de polyester, Uniqlo révolutionne un vêtement habituellement épais et coûteux, réservé aux fans de montagne. Soudain, la veste polaire devient légère et abordable. Cette année-là, le groupe en vend 2 millions dans l'Archipel et se découvre une nouvelle identité. «Nous ne sommes pas un groupe de mode mais un développeur de technologies pour tous», a théorisé Tadashi Yanai. La formule est désormais de toutes les réunions. Contrairement aux ténors de la «fast-fashion», Zara ou H & M, qui produisent, chaque saison, dans un calendrier record, plus de 30000 références distinctes en petits volumes pour coller à la mode, Uniqlo décide, lui, de construire un catalogue limité de produits. Ses commandes gigantesques pour une même référence, vendue pendant plusieurs trimestres, lui permettent d'obtenir des prix raisonnables sur des produits de qualité. «Nous ne poussons pas un look particulier. Nous voulons fournir à chacun les éléments qui répondront au mieux aux besoins du quotidien. C'est le principe du LifeWear», détaille Aldo Liguori. «On essaie de faire des vêtements amis, c'est-à-dire que l'on peut garder, s'approprier. Il y a aussi cette idée d'intemporalité très importante pour Uniqlo», complétait, il y a quelques semaines, le Français Christophe Lemaire, dans une vidéo de présentation de sa dernière collection pour la marque. Quand il briefe ses créateurs, Tadashi Yanai évoque l'inspiration de Steve Jobs dans le processus de création de l'iPhone. Un produit pur et parfait, détaché des contingences de la mode, qui s'est imposé naturellement.

Un labo pour tester des fibres innovantes

Une large partie de cette transformation d'Uniqlo en Apple du vêtement se joue dans la banlieue de Kyoto, chez Toray Industries, un spécialiste des matériaux composites. C'est dans un atelier proche de l'usine où est produite la fibre carbone des ailes du Boeing 787 que, depuis 2002, des ingénieurs, sollicités par Fast Retailing, inventent les textiles du futur. «A l'époque, tous les groupes utilisaient le coton pour les sous-vêtements. C'était incontournable», se souvient Tetsuo Horino, un cadre de Toray. «Mais nous avons commencé à tester ensemble de nouvelles fibres de rayonne ou encore de polyuréthane et, après plus d'un an d'essais, nous avons sorti le premier tissu Heattech, qui absorbe mieux la transpiration et génère même de la chaleur.» Des sous-vêtements ainsi fabriqués sont testés dans le Technorama de Toray, une salle hermétique où sont reproduites des conditions climatiques extrêmes. Des ingénieurs habillés de produits Heattech sont soumis, alors qu'ils marchent sur un tapis de course, à de fortes chaleurs, à de l'humidité et à de grands froids pour étudier l'évolution de leur température corporelle et prouver l'efficacité de ce nouveau textile. «Nous allions pouvoir affronter le froid sans accumuler des couches d'habits», explique Yoshihiro Kunii, de Fast Retailing, qui rappelle que le produit n'a depuis cessé d'évoluer. Le groupe tient enfin l'une de ces «innovations utiles» rêvées par Tadashi Yanai.

L'Amérique résiste encore

Uniqlo vend aujourd'hui 350 types de produits Heattech différents. Cette gamme et les sous-vêtements Airism déclinés pour les périodes chaudes ont porté une grande partie de la croissance du groupe à l'international. Notamment en Chine et en Corée du Sud, où les hivers sont rudes et les étés étouffants. «Le potentiel est énorme. Dans certaines mégapoles chinoises, on ne compte encore qu'un seul Uniqlo», pointe Oliver Matthew, un analyste de CLSA. En Chine, le groupe opère déjà 436 magasins et en ouvre 50 de plus par an. «Partout en Asie, le groupe bénéficie de la force de la marque Japon. Une réputation très solide qu'on ne retrouve pas forcément en Occident.» D'autres continents résistent encore au modèle Uniqlo. Ses premiers pas à l'international ont d'ailleurs été très laborieux. Voulant conquérir en premier lieu le marché britannique, le groupe ouvre un magasin à Londres en 2001, puis 21 autres boutiques. Deux ans plus tard, il en ferme 16, essoré par les pertes. «Notre grande erreur aura été d'essayer de faire les choses à l'anglaise plutôt que de capitaliser sur nos forces», analysera plus tard Tadashi Yanai. L'entrée en Chine, en 2002, est également très chaotique. «Nous avions aussi voulu trop nous adapter au marché chinois, avec des prix beaucoup plus bas, tenant compte des revenus locaux. C'était une erreur. Uniqlo a une identité japonaise. Personne ne voulait d'un Uniqlo chinois!», écrira plus tard le PDG.

Le démarrage aux Etats-Unis se révèle plus difficile encore. En 2005, la société décide de fermer, après seulement quelques mois d'exploitation, les trois premiers magasins inaugurés dans des malls du New Jersey. «Personne ne nous connaissait», expliquent les cadres, qui ont ensuite misé, à la fin des années 2000, sur l'ouverture de magasins spectaculaires à New York, notamment sur la Cinquième Avenue, pour construire l'image de la marque et relancer l'aventure américaine. Sans grand succès pour le moment. L'an dernier, Uniqlo a encore enregistré des pertes outre-Atlantique et a dû revoir brutalement à la baisse son rythme d'ouvertures de boutiques dans le pays. «Ils sont sur un marché ultracompétitif où plusieurs concurrents proposent déjà de bons vêtements de base à des prix intéressants», explique l'analyste indépendante Janet Kloppenburg. «Et leur approche déroute un peu les consommateurs américains», suggère l'experte, qui pointe le gigantisme et la froideur des magasins Uniqlo. «Ils ne racontent aucune histoire.»

Un but, devenir leader mondial

Partout dans le monde, le groupe veut, en effet, offrir cette même expérience épurée au service impeccable. Chaque manager de boutique est d'ailleurs envoyé pendant six mois au Japon, dans le centre de formation de la société, pour être initié aux codes et aux méthodes Uniqlo. A son retour, il doit apprendre à ses équipes à plier impeccablement les tee-shirts sur des étagères rangées au cordeau. A la caisse, l'employé apprend les formules de politesse idéales, affiche un sourire permanent et tend toujours la facture à deux mains.

Malgré les difficultés, Tadashi Yanai ne renonce pas à la conquête de l'Amérique. «Je suis déterminé à réussir», confie le PDG. Car le groupe a besoin de grandir aux Etats-Unis et dans les pays émergents d'Asie, où ses prix restent élevés pour le grand public, s'il veut tenir son objectif ultime: s'imposer comme le numéro un mondial. Malgré les sourires dubitatifs des analystes, le dirigeant ne cesse de marteler, depuis des années, qu'il veut atteindre, d'ici à 2020, les 5000 milliards de yens (40 milliards d'euros) de ventes. Et les derniers résultats trimestriels, décevants (clémence de l'hiver, effets de change) ne le feront pas dévier de cet objectif. «Echouer n'est pas vraiment important, ce qui compte c'est d'apprendre de ses échecs et d'ensuite réussir», assure l'homme d'affaires dans un essai rédigé pour McKinsey sur l'avenir du Japon et de ses entreprises, qu'il trouve trop timorées. «Les Japonais sont très forts sur leur marché domestique mais terriblement faibles loin de chez eux», regrette le PDG. Il s'inquiète de la pusillanimité de la jeunesse nippone, qui rechigne de plus en plus à s'aventurer à l'international. Et reproche aux entreprises japonaises, gérées au consensus, de ne plus oser la moindre initiative innovante. «Nous avons perdu l'esprit qui nous habitait après la guerre, quand le Japon a émergé d'une situation où il n'avait plus rien. Peut-être parce que nous avons l'illusion d'être riches et supérieurs», redoute le milliardaire, qui espère inspirer de jeunes entrepreneurs. A la toute fin de l'e-mail de huit pages qu'il a envoyé le 1er janvier dernier, à 00h01, à tous ses employés, Tadashi Yanai concluait sur un passage des Misérables de Victor Hugo. «Rien n'est tel que le rêve pour engendrer l'avenir.»

D'autres patrons japonais qui détonnent

Masayoshi Son, PDG de Softbank.Ce fils d'immigrés sud-coréens n'a pas vingt ans lorsqu'il gagne, dans les années 1970, son premier million de dollars aux Etats-Unis, en vendant un petit traducteur de poche à Sharp. Après des études à Berkeley, il rentre au Japon pour créer Softbank et bouleverse le secteur des télécoms, alors dominé par des opérateurs ronronnants. À 58 ans, il pèse aujourd'hui 14 milliards de dollars et s'est diversifié dans les jeux vidéo, l'énergie solaire et la robotique. Il a acheté le français Aldebaran et s'est aussi offert l'opérateur américain Sprint. Hiroshi Mikitani, PDG de Rakuten.Destiné à être un banquier sage au sein d'une institution japonaise endormie, après des études à Harvard, Hiroshi Mikitani a été bouleversé par la destruction de sa ville, Kobe, par le tremblement de terre de 1995. Saisi par un sentiment d'urgence, il a créé, deux ans plus tard, Rakuten, qui s'est imposée comme la plus grande plateforme de commerce en ligne du pays. Âgé de 50 ans, il cherche maintenant à construire un géant des services Internet. Son groupe a acquis PriceMinister en France et la plateforme de messagerie instantanée Viber.

L'inspiration française d'Uniqlo

Christophe Lemaire Un an seulement après avoir quitté Hermès pour créer son propre label, le créateur français a commencé, l'an dernier, à dessiner, avec sa codesigner Sarah-Linh Tran, des vêtements pour Uniqlo. Il affirme partager la même philosophie que Tadashi Yanai et s'est efforcé de penser des collections de «vêtements amis» épurés pour homme et femme.Inès de la Fressange L'ancienne muse de Karl Lagerfeld a lancé en janvier dernier sa cinquième collection pour la marque japonaise, qui a voulu, depuis le début des années 2010, apporter une touche un peu plus «mode» à son offre basique pour les femmes. Inès de la Fressange infuse à ses vêtements un caractère «chic» et «parisien» qui séduit beaucoup en Asie.Carine Roitfeld Ancienne rédactrice du Vogue français, devenue directrice de la mode des éditions globales de Harper's Bazaar, Carine Roitfeld a déjà collaboré à deux collections chez Uniqlo, où elle échange beaucoup avec Naoki Takizawa, directeur artistique de la marque depuis 2011.