• 21/09/2022
  • Par binternet
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Faut-il être vraiment inconscient pour ne pas laver son jean?<

Il se vendrait dans le monde 2,3 milliards de jeans par an, soit 73 jeans par seconde, d'après la directrice générale de Kaporal, Laurence Paganini. Autrefois réservé à la classe ouvrière, ce bleu de travail s'est imposé aujourd'hui comme le compagnon omniprésent et multiculturel de l'homme moderne. Acheté brut, le bel indigo d'une paire s'éclaircit petit à petit, marquant les habitudes de son propriétaire.

Les zones usées en disent long sur la façon de marcher de ce dernier, sa manière de s'asseoir, la poche dédiée à son smartphone et celle pour son portefeuille. La plupart des marques de prêt-à-porter vend des jeans déjà nettoyés au moins une fois pour éviter qu'ils ne rétrécissent naturellement au premier lavage réalisé par son acquéreur. Certains y ajoutent de l'élasthanne pour rendre son port plus confortable. Mais les clients puristes, eux, préfèrent se diriger vers un vrai jean en toile denim brute, sans élasthanne, jamais lavé, dont l'usure témoignera de leur style de vie. Et de leur hygiène...

Les plus extrémistes préconisent de ne jamais, au grand jamais, laver leur jean. Parmi eux, le PDG de Levi's lui-même, Chip Bergh: «Une bonne paire de jean n'a pas vraiment besoin d'être lavée, sauf à de rares occasions», explique-t-il au magazine Fortune. Force nous est d'admettre qu'il sait sûrement de quoi il parle.

Faut-il être vraiment inconscient pour ne pas laver son jean?

Selon lui, cela abîmerait la toile et gâcherait inutilement de l'eau. En cas de tache, un coup de brosse à dents ou d'éponge suffirait. «Si vous lavez votre jean trop tôt, l'indigo va s'estomper de façon trop uniforme, sans aucune magie». De son côté, la marque suédoise spécialiste en denim Nudie Jeans défend l'idée selon laquelle «l'odeur d'un jean longtemps porté et non lavé pourrait peut-être réveiller un mort. Mais c'est l'odeur d'un gagnant!» Les accros de l'indigo moins extrémistes s'acharnent à déconseiller de laver son jean avant au moins six mois de port et le moins possible par la suite, afin de respecter au mieux l'usure naturelle et esthétique des pigments.

Pour éliminer les mauvaises odeurs, les puristes rivalisent d'ingéniosité: une nuit suspendue par la fenêtre ou dans un sac en plastique au fond du congélateur. D'un point de vue bactériologique, une étude canadienne a démontré qu'une paire portée tous les jours pendant 15 mois sans lavage présentait un taux de bactéries semblable à celui observé après une dizaine de jours de port. Si on prend donc la peine de ne pas porter le même pantalon tous les jours, voire l'aérer de temps et temps, et conserver une bonne hygiène corporelle, un jean rarement lavé ne devrait donc pas causer de maladie mortelle, d'après l'étude.

Si l'on n'apporte pas son costume trois pièces plusieurs fois par semaine au pressing, on devrait donc faire de même avec un jean brut, pour éviter de le délaver trop rapidement. D'autant qu'il risquerait bien de rétrécir. C'est pourquoi la marque française A.P.C., spécialiste du denim, recommande sur son site différentes méthodes de lavage, avec en première ligne une «recette extrémiste» qui consiste à garder son jean sale le plus longtemps possible. Si les habitants littoraux pourront s'essayer à la «recette eau de mer» («garder son jean sale le plus longtemps possible, prendre un bain de mer habillé de son jean, le frotter avec du sable sec, recommencer l'opération plusieurs fois. Rincer à l'eau douce et laisser sécher au soleil»), nous vous recommandons plutôt la «recette machine»: à 30°C, programme délicat sans essorage avec de la lessive spéciale vêtements noirs, à appliquer aussi peu fréquemment que votre conscience hygiéniste vous y autorise (selon les puristes, tous les trois mois maximum).